Interview de Julie Solbreux
Julie, tu es chercheuse au sein de l’Institut de Recherches en didactiques et éducation. Peux-tu nous expliquer son rôle au sein de l’UNamur ? Joue-t-il également un rôle en dehors de la sphère universitaire ?
IRDENa est un institut de recherche multidisciplinaire à l’image de tous les centres de recherche de l’UNamur. Il met les questions d’éducation et de didactique au cœur des discussions de ses membres qui sont issus de différentes Facultés et Départements. On peut par exemple y côtoyer des chercheurs et chercheuses en didactique des langues, de la biologie, des mathématiques, etc. ainsi que des chercheurs et chercheuses en psychologie, en psychopédagogie, etc. Nous mettons en commun notre diversité pour mieux comprendre l’éducation au sens large, celle-ci démarrant dans l’enfance et se poursuivant tout au long de la vie. Dans ce contexte, nous travaillons en partenariat avec des chercheurs et chercheuses d’autres centres de recherche, des acteurs de l’enseignement et de la formation, des entreprises, et évidemment les apprenant.e.s (étudiant.e.s, professionnel.le.s, chercheurs et chercheuses) afin de répondre à des questions sociétales vives et contemporaines. En ce qui me concerne, mon intérêt porte sur l’éducation au développement durable qui pose énormément de défis: comment au mieux l’intégrer dans les programmes d’enseignement? Faut-il commencer chez les plus jeunes? avec quelles balises pour les enseignants?
Peux-tu nous expliquer ta recherche ?
Avec plaisir…
Cette recherche est le fruit d’un travail collectif avec Sophie Pondeville (UNamur, IRDENa) et Julie Hermans (UCLouvain, LouRIM). La première est professeure à la Faculté des Sciences Economiques, Sociales et de Gestion et responsable de sa cellule didactique. La seconde est professeure d’entrepreneuriat et d’innovation à l’UCLouvain et professeure visiteur à l’UNamur. Notre travail prend sa source dans une recommandation européenne qui invite à développer l’esprit d’entreprendre des jeunes. C’est un sujet qui est vaste et que nous avons décidé d’aborder à partir d’une observation de terrain : si les initiatives des jeunes sont naturellement de plus en plus colorées « sociales et durables », les accompagner n’en reste pas moins un nouveau challenge pour les acteurs de l’éducation.
Nos recherches proposent de travailler consciemment à soutenir des idéaux mobilisateurs, porteurs d’espoir et résolument tournés vers l’avenir. En bref, nous souhaitons transmettre aux acteurs de l’éducation, coaches et formateurs des outils et des techniques opérationnalisables pour soutenir une forme d’éducation entrepreneuriale qui soit sociale et durable. L’une des techniques proposée est l’approche narrative où le partage d’histoires révèle et rend visible les espoirs des apprenants. Ces histoires nourrissent le collectif et le rendent plus fort face aux enjeux sociétaux qui paraissent colossaux.
Tu travailles donc à “cartographier un écosystème”, que fais-tu concrètement ?
L’écosystème, c’est l’ensemble des parties prenantes qui participent à un même but ou une même innovation. Par exemple, l’écosystème namurois de l’éducation à l’entrepreneuriat social et durable va comprendre l’UNamur qui forme les enseignant.e.s et étudiant.e.s dans toutes disciplines, mais aussi le TRAKK qui leur ouvre leurs portes pour les formations et pour concrétiser les projets entrepreneuriaux sociaux et durables, etc. En cartographiant l’écosystème, nous essayons de rendre visible les liens et les maillages qui créent la richesse et la diversité des initiatives. Collaboration, partenariats, synergie autant de mots qui prennent leur sens et que nous tentons de mettre en évidence. Et cette technique est applicable à d’autres écosystèmes !
Tu vas développer la plateforme E³ by UNamur. Peux-tu nous expliquer son but ?
Dans le cadre d’un projet financé par la Sowalfin, je coordonne la création d’une vitrine de l’Ecosystème d’Education Entrepreneurial (E³) de l’UNamur. Le site présentera les différentes initiatives de l’éducation à l’entrepreneuriat menées par les acteurs de l’UNamur et des outils pédagogiques à disposition des enseignants. Ce serait aussi un point d’entrée pour contacter d’autres acteurs de l’écosystème, partager une initiative, recommander un outil pédagogique, témoigner d’un retour d’expérience.
En ce qui concerne les témoignages, nous souhaitons les organiser pour rendre visible l’écosystème. Nous nous inspirons des travaux réalisés en approche narrative collective où l’un des aspects mobilisateurs est la création d’un dialogue entre communautés. Cette forme de communication se matérialise par la rédaction de récits qui rendent compte de l’influence positive des actions d’une communauté pour une autre.
Dans notre cartographie de l’écosystème de l’éducation entrepreneuriale, nous présentons des expériences d’étudiants et d’autres membres de chaque communauté de l’écosystème qui soutiennent les apprentissages de nos étudiants (enseignants, entrepreneurs, organismes d’accompagnement, ONG, services généraux de l’UNamur, parents et amis des étudiants, etc.), récoltant de la sorte les retours d’expérience de tout l’écosystème.
On le sait, la Ville de Namur travaille beaucoup à développer sur son territoire une dynamique d’innovation urbaine (TRAKK) et accueille également un écosystème entrepreneurial riche. Que penses-tu des actions mises en place par la Ville ?
Un grand nombre de ces actions visent des lieux précis comme le TRAKK ou le site du Grognon qui (re)devient lieu de confluence. C’est riche car cela permet à l’écosystème de se matérialiser : prendre vie et stimuler les rencontres. Encore faut-il que les différentes parties prenantes s’y rendent ! En cartographiant les liens parfois improbables entre parties prenantes, nous espérons donner aux étudiants l’envie de rejoindre l’écosystème et les encourager à s’approprier les lieux et actions proposées par la Ville.
